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Mayotte : un an après le cyclone Chido, l’insécurité explose

• 12.12.2025, 17:56
4 min de lecture
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Un an après le passage du cyclone Chido, Mayotte peine toujours à se relever. Loin de s’atténuer, les difficultés se sont multipliées : montée de la violence, cambriolages à répétition, quartiers désertés et infrastructures toujours hors service.

À Passamainty, sur les hauteurs de Mamoudzou, les traces du cyclone sont toujours visibles, mais c’est la criminalité qui a accéléré l’exode des habitants. Derrière sa clôture anti-intrusion, Nizar Hajar observe un quartier presque vide : « C’est devenu un no man’s land », témoigne-t-il.

Autour de sa maison, les habitations se sont peu à peu vidées : « Par exemple, cette maison a été vidée. Aucune d’entre elles n’est encore habitée car elles ont été attaquées. Celle-là a été cambriolée trois ou quatre fois », poursuit-il.

En juillet 2025, la maison voisine a été prise d’assaut. Les voleurs ont tenté d’entrer en creusant un trou dans le mur. La scène, filmée par les habitants, montre deux hommes cagoulés et armés de machettes. L’agression a eu lieu en plein jour, sous les yeux de voisins stupéfaits. Pour Nizar, c’est la dixième attaque violente en deux ans. Sa maison s’est transformée en petite forteresse : caméras, alarmes, portes renforcées.

Une explosion des cambriolages depuis Chido

Selon les chiffres locaux, les cambriolages ont augmenté de 35 % depuis le cyclone. Une tendance que les autorités attribuent en partie aux dégâts causés par la catastrophe. La mairie de Mamoudzou n’a plus les moyens de faire fonctionner son système de vidéosurveillance : caméras et écrans sont hors service depuis un an, faute de budget.

Le maire, Ambdilwahedou Soumaïla, le regrette amèrement : « Nous sommes dans le noir parce qu’en plus des caméras, les radios ne fonctionnent plus. Même les agents n’ont nulle part où travailler dans de bonnes conditions. »

Sans images, sans radios fiables et avec moins de renforts policiers qu’après le cyclone, les forces de l’ordre tentent d’occuper le terrain comme elles le peuvent.

Les patrouilles de la BAC se succèdent dans les zones les plus sensibles, notamment les bidonvilles de tôle où vivent de nombreuses familles étrangères et où, selon les policiers, se regroupent plusieurs bandes locales. La tension y est palpable. Les agents décrivent un environnement où « tout le monde observe tout le monde », et où leur présence déclenche régulièrement des jets de pierre ou de projectiles métalliques.

Les voitures de police en portent les traces : impacts, carrosseries enfoncées, vitres fissurées.

Une population épuisée, une reconstruction à l’arrêt

La tombée de la nuit accentue encore la difficulté. À cause des dégâts laissés par le cyclone, de nombreuses rues restent non éclairées. « Dans ce quartier, il y avait des lumières un peu partout. Depuis le passage de l’ouragan, c’est l’obscurité totale », explique un policier.

Dans ces conditions, repérer un délit en cours devient presque impossible. Les agents arrivent souvent trop tard.

La plupart des vols sont commis par de jeunes hommes, parfois mineurs, souvent sans ressources. Kader, 23 ans, né à Mayotte de parents comoriens, assume avoir déjà purgé plusieurs peines de prison. « On est violent parce qu’on n’a pas assez à manger. Et puis on veut s’habiller comme les autres, avoir les mêmes baskets. Mais tu n’as pas de travail, tu n’as rien. Alors on se sent obligé de voler, même si ce n’est pas bien », confie-t-il.

Un an après Chido, les stigmates du cyclone sont encore bien visibles. Les habitants vivent entre les ruines, la peur et la colère. La reconstruction n’a véritablement commencé que par endroits, et l’île semble s’enliser dans une spirale d’insécurité et de pauvreté dont les Mahorais peinent à sortir.