Nous devons améliorer la démocratie, déclare Lech Wałęsa

Lech Wałęsa, ancien président de la Pologne et figure clé de la lutte pour la démocratie dans le pays, a reconnu dans une interview exclusive avec Euronews que des erreurs générationnelles ont été commises, mais que des solutions commencent à émerger. Bien qu'il ait quitté ses fonctions depuis près de trois décennies, Wałęsa reste profondément lié aux réalités politiques de la Pologne et du monde. Ces dernières années, la défense de la démocratie est devenue une priorité pour l'ancien dirigeant.

« Regardez ce qui se passe dans le monde aujourd'hui : Trump, la France, l'Allemagne. Quelle conclusion notre génération doit-elle tirer ? Nous devons améliorer la démocratie car les gens n'y croient plus et ne la défendent plus », a souligné Wałęsa.

L'ancien président estime que les élus devraient pouvoir être révoqués et que le financement des partis politiques et des hommes politiques doit être totalement transparent. « Cette génération devrait donner la priorité à ces trois points dans tous ses programmes politiques. Ce n'est qu'à cette condition que nous pourrons rétablir la confiance dans la démocratie et assurer sa défense. Sinon, les démagogues populistes mettront le feu à notre monde », a prévenu Wałęsa.

Wałęsa s'est dit préoccupé par l'état actuel de la démocratie, affirmant que de nombreux pays fonctionnent encore selon des systèmes politiques dépassés. Il a appelé à l'élaboration de nouveaux systèmes qui reflètent l'évolution du paysage mondial. « La construction de l'État que nous connaissons s'est achevée à la fin du XXe siècle. La démocratie, telle que nous la concevons, s'est achevée à la fin du XIXe siècle. Que signifie la gauche ou la droite aujourd'hui ? Ce sont des concepts dépassés qui ne sont plus adaptés à notre époque ».

Selon Wałęsa, la tâche de la nouvelle génération est de redéfinir le monde et de raviver la confiance dans la démocratie. Il a insisté sur la nécessité d'un discours public et sur les nouvelles idées qui doivent émerger de ces conversations.

Inquiétudes sur l'avenir de l'Ukraine

Lors de la discussion sur le conflit en cours en Ukraine, Wałęsa s'est inquiété d'un éventuel mauvais compromis imposé à Kiev après avoir accepté les conditions de cessez-le-feu américaines. « L'Ukraine se défend contre l'agression russe, mais ce qu'elle fait est aussi un choix de civilisation. Ce que la Russie et même Trump représentent, c'est la régression, un pas en arrière dans le développement », a déclaré Wałęsa.

Il a également estimé que les négociations de paix entre l'Ukraine et la Russie ne suffiraient pas à apporter un changement durable. « Même si nous aidons l'Ukraine à gagner aujourd'hui, la Russie se relèvera dans dix ou quinze ans si nous ne l'aidons pas à changer son système politique », a-t-il averti. Pour Wałęsa, la clé de la stabilité à long terme réside dans la construction d'une société civile en Russie.

Wałęsa a également souligné que l'Occident a parfois joué un rôle dans l'attitude agressive du président russe Vladimir Poutine. « Il y a eu un moment où Poutine était sur la bonne voie. Mais la façon dont le monde l'a traité comme un " bandit " l'a poussé dans la mauvaise direction », a-t-il noté, ajoutant que les évaluations des dirigeants mondiaux devraient être nuancées. « Nous devons être prudents dans nos jugements et réfléchir d'abord à ce que nous faisons. »

L'ancien président a énoncé trois principes qui, selon lui, pourraient contribuer à stabiliser la vie politique et la gouvernance. Wałęsa a soutenu que les hommes politiques devraient être limités à deux mandats pour éviter la concentration du pouvoir. Établissant un parallèle avec la Russie, il a déclaré : « Ce n'est pas Poutine ou Staline, c'est le système politique qui engendre l'autoritarisme. La Russie est un beau pays, mais son système politique est mauvais ».

Le danger des armes et du développement d'armes

Conformément à sa croyance en des solutions pacifiques, Wałęsa a critiqué la course aux armements, y compris le développement d'armes nucléaires, comme une voie menant à des résultats destructeurs. Tout en reconnaissant la nécessité de disposer de mécanismes de défense efficaces, il a mis en garde contre la tentation d'attaquer. « Si nous continuons sur cette voie, nous serons tous perdants. La seule raison de nous défendre est de créer un espace de réflexion et de changement systémique. Sans cela, il n'y aura pas de gagnants. Nous serons tous vaincus", a conclu Wałęsa.