Italie et migrants : entre hotspots, accords bilatéraux et premier test du Pacte européen
L'Italie, ainsi que l'Espagne, la Grèce et Chypre, sont au centre du premier rapport annuel de la Commission sur le Pacte sur les migrations et l'asile, qui mesure la pression migratoire sur les États membres et définit qui peut demander l'aide d'autres pays de l'UE.
Selon ce mécanisme, l'Italie fait partie des pays présentant un "niveau disproportionné d'arrivées", même si les débarquements irréguliers dans l'UE ont diminué de 35 % par rapport à l'année précédente.
La Commission envisage trois modes de contribution : la relocalisation des migrants**, l'aide financière ou le soutien opérationnel et technique aux pays tiers**. Toutefois, les modalités précises ne seront officialisées qu'après approbation par le Conseil de l'UE.
Le gouvernement de Giorgia Meloni dirige la politique migratoire de l'Italie avec une approche axée sur un premier accueil structuré, le renforcement des hotspots et la coopération avec les pays de départ et de transit.
Le système d'accueil à deux niveaux en Italie
Au niveau national, l'Italie a consolidé un système d'accueil à deux niveaux. Le premier accueil a lieu immédiatement après l'arrivée des migrants dans les hotspots, où une assistance matérielle et médicale est garantie et où les procédures d'identification sont achevées. Ensuite, les migrants sont transférés dans les structures territoriales des préfectures, où ils reçoivent des services essentiels en attendant la définition de la demande de protection internationale.
Le deuxième niveau d'accueil concerne les titulaires d'une protection internationale et les mineurs non accompagnés. Ici, les autorités locales participent volontairement au réseau de projets, en collaboration avec le secteur tertiaire, pour offrir des parcours d'intégration.
La distribution des ressources est gérée par le Fonds national pour les politiques et les services d'asile (en italien) et chaque projet est évalué par une commission composée de représentants du ministère de l'intérieur, d'un représentant de l'Association nationale des municipalités italiennes (ANCI) et d'un représentant de l'Union des provinces italiennes (UPI). Un représentant du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR) et un représentant des régions font également partie de la commission.
Pression sur les pays frontaliers
Historiquement, l'Italie a été confrontée aux limites du règlement Dublin III, qui impose aux pays de première entrée de gérer les demandes d'asile. En tant que pays frontalier de la Méditerranée, l'Italie a été confrontée à des flux concentrés et récurrents, souvent sans mécanisme de redistribution efficace entre les États membres.
Cette situation a suscité des controverses internes et des tensions avec Bruxelles, incitant les gouvernements successifs à rechercher des solutions bilatérales et à faire preuve de souplesse dans la gestion des migrants conformément au règlement de Dublin.
Accords bilatéraux et points chauds extérieurs : le cas de la Libye
Le gouvernement Meloni a conclu des accords bilatéraux avec la Libye, la Tunisie et l'Albanie, dans le but de prévenir les départs irréguliers, de lutter contre les trafiquants et de faciliter les retours.
Une attention particulière a été accordée aux hotspots externes, tels que ceux prévus en Albanie,conçus pour enregistrer et gérer temporairement les migrants avant leur éventuel transfert vers l'Italie.
Le pacte Italie-Libye a suscité de nombreuses controverses : les ONG et les associations de défense des droits de l'homme dénoncent les conditions de vie dans les centres libyens, accusés de violer les droits fondamentaux et de détenir les migrants dans des situations précaires et dangereuses. Les critiques soulignent également le risque que l'Italie soit perçue comme complice de pratiques abusives, alors que l'objectif officiel est de réduire les débarquements et de régulariser les flux migratoires.
Le défi du mécanisme de solidarité de l'UE
Le nouveau mécanisme de solidarité de l'UE constitue une sorte de test pour l'Italie. La Commission a souligné que la participation des États membres devait respecter l'équilibre entre solidarité et responsabilité. Cependant, toute lacune dans la gestion interne des arrivées pourrait mettre en péril l'ensemble du système.
Pour l'Italie, le défi est double : continuer à contrôler les flux par le biais des hotspots et des instruments nationaux, assurer l'accueil et l'intégration tout en négociant efficacement dans le cadre européen pour la redistribution des migrants.
La stratégie italienne sous le gouvernement Meloni reste rigide et sélective, centrée sur les contrôles, les hotspots internes et externes, la redistribution et la coopération internationale. L'Italie est confrontée à un pacte européen qui devra prouver qu'il fonctionne dans la pratique, en particulier dans les cas de forte pression migratoire tels que la Méditerranée.
Le principal défi consiste à trouver un équilibre entre la sécurité, l'accueil et le respect des droits de l'homme, dans un contexte européen et mondial de plus en plus complexe.