Tanzanie: tirs policiers mortels, possible fosse commune... Une enquête CNN revient sur la répression post-électorale
Par TV5MONDE avec agences
Tirs mortels, morgues débordées et une possible fosse commune... C’est ce que révèle l’enquête publiée par le média américain CNN ce samedi 21 novembre. À l'aide de preuves visuelles et audio, l’investigation démontre que les forces de sécurité tanzaniennes ont tiré sur des manifestants après le scrutin contesté du 29 octobre.
Tirs mortels, morgues débordées et une possible fosse commune... C’est ce que révèle l’enquête publiée par le média américain CNN ce samedi 21 novembre. À l'aide de preuves visuelles et audio, l’investigation démontre que les forces de sécurité tanzaniennes ont tiré sur des manifestants après le scrutin contesté du 29 octobre.
La présidente sortante Samia Suluhu Hassan est officiellement réélue avec 97,66% des voix, le 29 octobre dernier, après déjà quelques jours de troubles dans le pays. Plusieurs figures de l’opposition avaient été empêchées de se présenter ou arrêtées, provoquant un climat de défiance inédit. Une fois les résultats annoncés, des manifestations éclatent à Dar es Salaam, Mwanza et Arusha. Le pays sombre dans la violence et les autorités répliquent par un couvre-feu, la coupure de l’Internet mobile et un déploiement massif de policiers et de militaires dans plusieurs quartiers.
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Après quelques jours de manifestations et violences, des sources fiables de la capitale évoquaient un bilan de plus de 1.000 morts. Dans son enquête, CNN publie des vidéos géolocalisées, des images satellites documentées dans plusieurs villes du pays.
Des morgues "débordées" et de possibles "fosses communes"
À Arusha, la chaîne raconte avoir authentifié des séquences où une femme enceinte et un jeune homme sont touchés à la tête par des tirs lors de manifestations, alors qu’ils n’étaient pas armés. L'analyse sonore effectuée par CNN révèle que les coups de feu proviennent d'une certaine distance, qui plus est d'un endroit où se trouvent des policiers, suggérant que ces derniers ont tiré en direction de la foule plutôt que dans le cadre d’un affrontement rapproché.
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À Mwanza, ce sont plusieurs médecins interrogés par CNN qui décrivent des morgues “débordées”. Selon ces témoignages, des corps de manifestants présentant des blessures par balle à la tête, au torse ou à l’abdomen ont été déposés à l’extérieur des hôpitaux, entassés les uns sur les autres, une fois qu'il n'y avait plus de place à l’intérieur des morgues. Un des médecins ayant requis l’anonymat raconte même que des individus décédés ont été amenés à la morgue par la police. Parmi les victimes, blessées ou décédées, figuraient de nombreux jeunes hommes.
Des images satellites du cimetière de Kunduchi, au nord de Dar es Salaam, montrent des zones où la terre a été fraîchement retournée au début du mois de novembre, rapporte CNN. Des vidéos filmées sur place témoignent d'un sable remué, de racines arrachées ainsi que de morceaux de tissu. Des indices qui révèlent la présence d'une fosse commune, selon une coalition d'organisations tanzaniennes de défense des droits humains ainsi que deux sources locales, dont les témoignages ont été recueillis par CNN. Le média américain précise que les autorités n’ont pas répondu à ses demandes de commentaire.
Dans de nombreuses villes, des vidéos sur les réseaux sociaux montrent des agents de sécurité et des hommes en civil, armés, que les habitants soupçonnent d’être des policiers, selon CNN. Ils auraient poursuivi et ouvert le feu sur les manifestants, dans des zones résidentielles. Il est même question de jeunes footballeurs tués par balles à leur domicile durant ces manifestations.
Un bilan toujours impossible à établir
Aucun bilan officiel n’a été publié par le gouvernement tanzanien depuis le début de cette crise. Pour l’opposition, il est question de plusieurs centaines de morts. Elle accuse les autorités de dissimuler l’ampleur de la répression.
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Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme a déclaré avoir reçu “des rapports crédibles selon lesquels au moins dix personnes ont été tuées et plusieurs autres blessées lors des manifestations liées aux élections”. La vérification indépendante des faits a été rendue compliquée pour les observateurs internationaux à cause notamment des coupures internet.
Pour répondre aux critiques, la présidente Samia Suluhu Hassan a annoncé la création d’une commission d’enquête nationale chargée d’examiner les violences survenues après le scrutin. Pour l’heure, aucun calendrier n’a été communiqué.
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