L'IA est-elle vraiment à l'origine de licenciements massifs dans les entreprises technologiques ?

Si vous lisez un avis de licenciement collectif type de 2025 d'un PDG du secteur technologique, vous pourriez penser que l'intelligence artificielle (IA) a coûté leur emploi aux employés.

Cependant, la réalité est plus complexe. Les entreprises expliquent qu'elles se rendent plus efficaces tout en se préparant à des changements plus importants provoqués par l'IA.

Selon un nouveau rapport du site d'offres d'emploi Indeed, les offres dans le secteur de la technologie ont diminué de 36 % par rapport à 2020. Mais ce n'est pas seulement parce que les entreprises veulent remplacer les travailleurs par l'intelligence artificielle.

Les débuts de ChatGPT en 2022, par exemple, correspondent également à la fin d'une vague d'embauches à l'époque de la pandémie.

"Nous nous trouvons dans une période où le marché de l'emploi dans la Tech est faible, mais où d'autres secteurs du marché de l'emploi ont également ralenti à un rythme similaire", a déclaré Brendon Bernard, économiste au Hiring Lab d'Indeed.

"Les offres d'emploi dans le secteur de la technologie ont en fait évolué de manière assez similaire au reste de l'économie, y compris par rapport aux offres d'emploi où il n'y a pas vraiment d'exposition à l'IA".

Cette nuance n'est pas toujours évidente à la lecture des six derniers mois de courriels de licenciements du secteur technologique, qui contiennent souvent un clin d'œil à l'IA en plus d'expressions de sympathie.

Le PDG de Workday, Carl Eschenbach, a par exemple déclaré dans un mail annonçant des licenciements massifs au début de l'année que "les entreprises réimaginent partout la manière dont le travail est effectué", citant la "demande croissante" d'IA dans son entreprise comme raison des licenciements.

La même rhétorique est utilisée à l'échelle internationale, par exemple par le géant indien de la technologie Tata Consultancy, qui a justifié ses 12 000 suppressions de postes en déclarant qu'il se préparait à déployer "l'IA à grande échelle pour nos clients et pour nous-mêmes".

Les dépenses liées à l'IA sont un facteur plus courant

Selon les experts, ce qui est plus courant que le remplacement d'emplois par l'IA, c'est le besoin d'argent supplémentaire pour mettre en œuvre l'IA dans l'ensemble des entreprises.

Les entreprises technologiques tentent de justifier des dépenses considérables pour payer les centres de données, les puces et l'énergie nécessaire à la construction des systèmes d'IA.

Bryan Hayes, stratège chez Zacks Investment Research, a déclaré que la restructuration à l'ère de l'IA était une "épée à double tranchant". Les entreprises essaient de "trouver le bon équilibre entre le maintien d'un effectif approprié et la possibilité pour l'intelligence artificielle d'occuper le devant de la scène".

Selon M. Hayes, les licenciements dans le secteur de la technologie ont permis d'améliorer les marges bénéficiaires, mais il est difficile d'évaluer ce que cela signifie pour les perspectives d'emploi de ces travailleurs.

"L'IA remplacera-t-elle certains emplois ? Absolument", a déclaré M. Hayes. "Mais elle va aussi créer de nombreux emplois".

Les employés du secteur technologique capables de montrer qu'ils peuvent "exploiter l'intelligence artificielle et aider les entreprises à innover et à créer de nouveaux produits et services seront ceux qui seront les plus demandés", a-t-il ajouté.

M. Hayes a cité l'exemple de Meta Platforms, la société mère de Facebook et d'Instagram, qui propose régulièrement des offres lucratives pour recruter l'élite des scientifiques de l'IA chez des concurrents tels qu'OpenAI.

Le rapport d'Indeed montre que les spécialistes de l'IA s'en sortent mieux que les ingénieurs en logiciel, mais que les offres d'emploi pour ces postes ont également diminué.

Selon M. Bernard, cela s'explique par les "hauts et les bas cycliques du secteur".

Les emplois de début de carrière sont les plus touchés

Le rapport d'Indeed révèle que l'IA impacte le plus les emplois de débutants dans tous les secteurs, notamment le marketing, l'assistance administrative et les ressources humaines.

Cela s'explique par le fait que ces emplois comportent des tâches qui se font facilement avec les outils d'IA générative.

Les offres d'emploi destinées aux travailleurs ayant au moins cinq ans d'expérience s'en sortent mieux, selon le rapport.

"La chute dans les embauches de la technologie a commencé avant la nouvelle ère de l'IA, mais l'évolution des exigences en matière d'expérience est quelque chose qui s'est produit un peu plus récemment", a déclaré M. Bernard.

À l'autre bout du spectre, certains types d'emplois semblent plus immunisés contre les changements liés à l'IA. Il s'agit notamment des travailleurs de la santé qui effectuent des prises de sang, suivis par les aides-soignants, les travailleurs de gestion de matières dangereuses, les peintres et les embaumeurs.