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Le Premier ministre moldave accuse la Russie de profiter des élections pour "prendre le pouvoir"

World • Sep 25, 2025, 5:00 AM
16 min de lecture
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Le Premier ministre de la Moldavie, Dorin Recean, tire la sonnette d'alarme. Ce mercredi 24 septembre, il a averti que la Russie dépensait des centaines de millions d'euros pour "prendre le pouvoir" à l'occasion des prochaines élections législatives qui s'annoncent cruciales pour le pays. Et pour cause, les résultats pourraient faire dérailler le processus d'adhésion du pays à l'Union européenne.

Ce dimanche, les Moldaves sont appelés aux urnes pour choisir leurs 101 nouveaux élus qui formeront le Parlement. Ces élections sont considérées par beaucoup comme un choix entre l'Est ou l'Ouest.

"La République de Moldavie est en campagne électorale. La Fédération de Russie est également en campagne électorale", a-t-il déclaré lors d'une allocution prononcée à l'issue d'une session du gouvernement. "C'est simplement que nous faisons campagne dans notre pays, et que la Fédération de Russie veut faire campagne, non pas dans son propre pays, mais dans le nôtre."

Le chef du gouvernement a également accusé le Kremlin d'essayer "de prendre le pouvoir à Chișinău, en violant la volonté souveraine" de la population moldave. "Il ne s'agit pas d'une bataille électorale ordinaire. Il s'agit d'un siège de notre pays."

Dorin Recean, un Premier ministre en campagne.
Dorin Recean, un Premier ministre en campagne. AP Photo

Moscou nie toute ingérence

Lors de sa prise de parole, le Premier ministre a énuméré plusieurs moyens par lesquels la Russie chercherait, selon lui, à prendre le contrôle de la Moldavie et à diminuer le soutien au parti pro-européen au pouvoir, le Parti Action et Solidarité (PAS). Majoritaire en 2021, le PAS risque de perdre son avantage dimanche, en l'absence d'autres alternatives pro-européennes viables sur le bulletin de vote.

Selon Recean, Moscou mènerait un vaste système d’achat de voix, aurait lancé plus de 1 000 cyberattaques contre des infrastructures gouvernementales depuis le début de l’année, préparerait des émeutes autour du scrutin et piloterait une campagne massive de désinformation en ligne.

Moscou a nié à plusieurs reprises toute ingérence en Moldavie. Ces accusations surviennent un jour après que les services de renseignement russes ont accusé des responsables européens de chercher à maintenir la Moldavie dans des "politiques russophobes".

La présidente de la Moldavie, Maia Sandu, arrive au 6e sommet de la Communauté politique européenne à Tirana, le 16 mai 2025.
La présidente de la Moldavie, Maia Sandu, arrive au 6e sommet de la Communauté politique européenne à Tirana, le 16 mai 2025. AP Photo

Le virage géopolitique de la Moldavie vers l'Ouest ces dernières années a irrité Moscou et les tensions entre les deux pays se sont considérablement dégradées.

La Moldavie était une république soviétique jusqu'à ce qu'elle proclame son indépendance en 1991. À la suite de l'invasion massive de l'Ukraine par la Russie en 2022, le pays a demandé à adhérer à l'UE et s'est vu accorder le statut de candidat cette année-là. Bruxelles a accepté d'ouvrir les négociations d'adhésion l'année dernière.

Depuis, Chișinău accuse Moscou de mener une guerre hybride visant à bloquer cette intégration, en finançant illicitement des partis pro-russes et en menant de vastes campagnes de désinformation auprès des électeurs avant les élections.

En 2024, les Moldaves avaient déjà approuvé de justesse, par référendum, la poursuite du chemin vers l’UE. Ce jour-là, la présidente pro-occidentale Maia Sandu a été réélue pour un second mandat. Ces scrutins avaient également été marqués par des accusations d’ingérence russe, démenties par Moscou.

Avertissement de Volodymyr Zelensky

S'exprimant devant l'Assemblée générale des Nations unies à New York, ce mercredi, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déclaré que la Moldavie se défendait contre l'ingérence de la Russie et que ses alliés occidentaux devaient renforcer leur soutien.

"Nous avons déjà perdu la Géorgie en Europe. La Géorgie est devenue dépendante de la Russie", a-t-il déclaré. "L'Europe ne peut pas se permettre de perdre également la Moldavie. L'Union européenne doit apporter un soutien financier et énergétique à la Moldavie."

Volodymyr Zelensky faisait alors référence à l'annonce du Premier ministre géorgien, Irakli Kobakhidze, qui a déclaré en novembre que son pays suspendait le processus d'adhésion à l'UE jusqu'en 2028, après que le Parlement européen a condamné les élections qui ont eu lieu en octobre, les jugeant ni libres ni équitables.

Le président ukrainien Volodymyr Zelenskyy s'exprime lors de l'Assemblée générale des Nations unies à New York, le 24 septembre 2025.
Le président ukrainien Volodymyr Zelenskyy s'exprime lors de l'Assemblée générale des Nations unies à New York, le 24 septembre 2025. AP Photo

Les détracteurs du Rêve géorgien, le parti au pouvoir d'Irakli Kobakhidze, l'accusent de se rapprocher de Moscou, tandis que l'UE a fait part de ses inquiétudes quant au recul de la démocratie, aux violations de la loi électorale et à l'utilisation abusive des institutions de l'État.

"Il est très important de se rappeler que le monde a ignoré la nécessité d'aider la Géorgie après l'attaque russe. Nous avons manqué ce moment. Il ne coûtera pas grand-chose à l'Europe de soutenir la Moldavie, mais ne pas le faire aura un prix beaucoup plus élevé", a déclaré Volodymyr Zelensky, qui rappelle alors l'invasion russe de la Géorgie en 2008, lancée par Moscou après avoir faussement accusé Tbilissi d'avoir commis un génocide dans la région séparatiste d'Ossétie du Sud.

"Nous ne devons pas oublier de protéger les droits des personnes et des nations dans les régions où ces droits sont menacés. La Charte des Nations unies et la Déclaration universelle des droits de l'homme doivent s'appliquer partout", a déclaré Volodymyr Zelensky.

Un oligarque pro-russe accusé d'ingérence

L'oligarque pro-russe en fuite Ilan Shor est un personnage clé de la campagne présumée de déstabilisation de la Moldavie. Il a été condamné, en 2023, pour fraude et blanchiment d'argent dans une affaire de disparition d'un milliard de dollars (environ 850 000 euros) dans des banques moldaves en 2014.

"Il existe des preuves, y compris des écoutes téléphoniques, qui prouvent que l'achat de votes est financé par la Fédération de Russie", a déclaré Dorin Recean. "L'instrument est le groupe criminel Shor, et les bénéficiaires sont plusieurs concurrents électoraux."

Propagande électorale du parti Șor, dirigé par l'oligarque moldave Ilan Shor, campagne de 2019.
Propagande électorale du parti Șor, dirigé par l'oligarque moldave Ilan Shor, campagne de 2019. AP Photo

À l'approche des élections, les autorités moldaves ont effectué des centaines de perquisitions et arrêté des dizaines de suspects. Cette semaine seulement, 74 personnes ont été interpellées lors de 250 opérations dans le cadre d’une enquête sur un plan présumé, soutenu par Moscou, visant à provoquer des émeutes. L’une des personnes arrêtées est soupçonnée d’avoir financé un parti politique via des cryptomonnaies.

"Les preuves de plus en plus nombreuses des actions subversives de la Russie augmentent l'inquiétude de la société. Je vous assure d'une chose : l'État de la République de Moldavie résiste", a déclaré Dorin Recean.

"Chers citoyens, la dernière bataille se joue pour l'avenir de notre pays", a-t-il ajouté. "Et je vous invite tous à y participer en votant honnêtement."

Le bloc favorable à la Russie organise un rassemblement

Dans le même temps, l'opposition s'organise. Un rassemblement a été organisé ce mercredi à Chișinău par le Bloc électoral patriotique (BEP), un parti d'opposition favorable à la Russie. Des dizaines de personnes ont scandé "À bas le PAS" et "À bas Maia Sandu", en référence au président pro-occidental de la Moldavie.

Le BEP, coalition de partis, promet de "normaliser" les relations avec la Russie tout en maintenant des liens avec l’UE, mettant en avant la défense de l’agriculture locale et de l’emploi. Le rassemblement de mercredi était présenté comme une "marche pour la paix".

Rassemblement prorusse à Chișinău, le 24 septembre 2025.
Rassemblement prorusse à Chișinău, le 24 septembre 2025. AP Photo

"La neutralité est la garantie de notre sécurité", a déclaré Nichita Romenschi, 22 ans, candidate indépendante du BEP. Elle a assuré que son parti œuvrait pour "la souveraineté et l'indépendance" de la Moldavie.

"La Moldavie doit avoir de bonnes relations avec tout le monde, avec l'UE et la Russie. Nous voulons que le gouvernement ait un visage humain et que les politiques servent les intérêts des gens simples", a-t-elle assuré.

Grigore Novac, membre du Parlement pour le Parti socialiste, a, de son côté, déclaré que "personne ne devrait intervenir dans le processus électoral" en Moldavie, "alors que des responsables européens sont venus", a-t-il accusé. "Cela démontre une ingérence de leur part dans la campagne, ce qui est interdit par la loi électorale."