Démocratie à vendre : fraude électorale au grand jour dans le village hongrois de Tiszabura

Des élections locales ont été organisées dimanche pour la troisième fois à Tiszabura, l'un des villages les plus pauvres de Hongrie. Comme la dernière fois, Zsigmond Fekete, le candidat de l'Association des communautés tsiganes, est arrivé en tête, avec un taux de participation surprenant d'environ 80 %.

Les deux résultats précédents ont été annulés par la Cour suprême hongroise pour cause de fraude électorale massive : des électeurs avaient été payés et transportés sur place, tandis que de l'argent liquide avait été retrouvé dans les urnes.

L'équipe d'Euronews a constaté que le troisième tour de dimanche n'était pas bien différent des précédents. Une voiture emmenait régulièrement des personnes au bureau de vote et une poignée de cartes d'identité est tombée de la poche de quelqu'un.

Une fraude bien rodée

Mais en quoi consiste la fraude électorale de Tiszabura, unique en Europe ? Le maire du village, Géza Vavrik - qui a démissionné cet été pour une affaire de bureau de tabac - nous en explique le fonctionnement.

"La collecte des cartes d'identité a commencé en début de semaine. Les détenteurs de cartes d'identité ont déjà reçu une somme à cet effet. Ce matin, ils commencent à retrouver ces personnes. Elles recevront à nouveau leur carte d'identité", a-t-il déclaré à Euronews.

"Je constate qu'ils ne sont plus conduits au bureau de vote dans leur voiture, mais qu'ils s'arrêtent ici, au coin de la rue. Ils entrent pour voter et demandent de l'aide. Un assistant vient alors dans l'isoloir leur dire quel candidat choisir, et ensuite ils obtiennent le reste de l'argent".

Selon Géza Vavrik, il est possible d'obtenir jusqu'à 70 000 HUF (170 €) par personne pour un vote, mais il existe également une réduction pour les familles. Seulement pour son adversaire, bien sûr, car il affirme ne rien faire de tel.

"Je voudrais demander de l'aide !"

La vraie spécialité de Tisabura, c'est la personne que l'on appelle "l'assistant". Dans les années 2000, le village a compris que ce qui comptait, ce n'était pas seulement pour qui l'on votait, mais aussi qui contrôlait le bureau de vote.

Comme un candidat ne peut envoyer qu'un seul délégué aux urnes, les principaux prétendants ont commencé à présenter des candidats improbables sur la liste électorale, afin d'avoir plus de personnes à leur solde infiltrées dans les bureaux de vote.

C'est pourquoi il y a 59 candidats sur le bulletin de vote, ce qui est déjà moins que lors du tour précédent.

"Je voudrais demander de l'aide !" : cette phrase a été prononcée des dizaines de fois en l'espace d'une heure. A ces moments-là, soit le buraliste du coin, soit l'un des délégués de l'équipe de la supérette se rendait dans l'isoloir pour vérifier le vote, car il ne restait plus que deux candidats en lice.

Il se pourrait bien que le village de Tiszabura fasse parler de lui pendant des mois encore, car même les agents de dépouillement s'attendent à ce que les résultats soient à nouveau annulés et à ce qu'une nouvelle élection soit organisée le 28 décembre, compte tenu des nombreuses irrégularités.

Pour l'instant, il semble que ce feuilleton ne se terminera que lorsque l'un des candidats se retirera, à bout de patience... ou d'argent.