France: Nicolas Sarkozy incarcéré, une première pour un ex-président

Par Pascale Veysset avec AFP


Une détention inédite dans l'histoire de la République. L'ancien président Nicolas Sarkozy a été incarcéré ce mardi 21 octobre à la prison parisienne de la Santé, près d'un mois après sa condamnation pour association de malfaiteurs dans le procès libyen. Il a immédiatement déposé une demande de mise en liberté, selon ses avocats, qui ont qualifié son incarcération de "honte".

Une détention inédite dans l'histoire de la République. L'ancien président Nicolas Sarkozy a été incarcéré ce mardi 21 octobre à la prison parisienne de la Santé, près d'un mois après sa condamnation pour association de malfaiteurs dans le procès libyen. Il a immédiatement déposé une demande de mise en liberté, selon ses avocats, qui ont qualifié son incarcération de "honte".
Le Brésilien Lula ou le Sud-Africain Jacob Zuma ont dormi en prison après avoir quitté le pouvoir. Mais ce n'est arrivé à aucun ancien chef d'Etat de l'Union européenne.
Avant de monter dans sa voiture, Nicolas Sarkozy est venu, accompagné de son épouse Carla Bruni, saluer ses partisans réunis à l'appel de sa famille, près de leur domicile de l'ouest parisien. "Libérez Nicolas!", "Nicolas! Nicolas!", a scandé la foule avant que le véhicule ne démarre, suivi par une nuée de caméras et de photographes.
La vérité triomphera. Mais que le prix à payer aura été écrasant. C'est un innocent que l'on enferme.
Nicolas Sarkozy, ancien président français
Parmi les partisans de l'ex-président, François, 66 ans, qui a refusé de donner son nom, a dénoncé un "procès politique" et dit être venu "pour la démocratie". "On est en Union soviétique!", a protesté un autre manifestant, tandis que deux drapeaux français ont été accrochés sur une grille et que résonnait épisodiquement la "Marseillaise".

"Trois semaines, un mois"
Nicolas Sarkozy, 70 ans, bénéficiera-t-il de dérogations ou de conditions de détention particulières eu égard à son statut?
Et surtout combien de nuits dormira-t-il dans sa cellule individuelle du quartier d'isolement, le plus à même de permettre d'assurer sa sécurité?
Ses avocats ont déposé une demande de mise en liberté.
La justice aura deux mois pour trancher, même si le délai devrait être plus court.
"Quoi qu'il arrive", ce sera "trois semaines, un mois de détention", a estimé son avocat Christophe Ingrain sur Europe 1.
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Le 25 septembre, le tribunal correctionnel de Paris avait condamné l'ancien président à cinq ans de prison.
Il a été reconnu coupable d'avoir sciemment laissé ses collaborateurs rencontrer à Tripoli un dignitaire du régime de Mouammar Kadhafi pour discuter d'un financement occulte de sa campagne présidentielle de 2007. L'ancien chef de l'Etat a fait appel et se dit innocent.
Re(lire) aussi: Financement libyen: Nicolas Sarkozy condamné à cinq ans de prison
Soupçons de financement libyen de la campagne 2007 de Sarkozy : les grandes dates de l'affaire
"Injustice et haine"
Plus encore que cette condamnation, c'est le mandat de dépôt qui avait suscité la stupeur. Pour les juges, il est justifié par la "gravité exceptionnelle" de faits "de nature à altérer la confiance des citoyens".
Nicolas Sarkozy avait fustigé une "injustice" et "la haine" dont le poursuivraient certains magistrats. Il s'est aussi comparé à Alfred Dreyfus, l'officier envoyé sur l'île du Diable pour trahison sur la foi d'un faux document et sur fond d'antisémitisme débridé.
Il a aussi confié qu'il entrerait à la Santé "la tête haute" et muni d'une biographie de Jésus et du roman "Le Comte de Monte-Cristo", un homme qui se venge après une condamnation injuste. Il devrait aussi écrire un "livre qui raconte l'expérience qu'il vit aujourd'hui", selon Me Ingrain.
Reçu par Macron
Même si l'incarcération de Nicolas Sarkozy s'est faite sur la base d'une mesure votée en 2019 à l'initiative de sa majorité, Emmanuel Macron avait soulevé ce point sur X, jugeant que "dans notre Etat de droit, la présomption d'innocence comme le droit au recours doivent toujours être préservés". Vendredi, il a reçu Nicolas Sarkozy, estimant ce geste "normal", "sur le plan humain".
Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, ira "voir en prison" celui qu'il considère comme son mentor en politique, afin de s'assurer de sa sécurité. Une telle visite serait de nature à poser un "obstacle à la sérénité" avant les prochaines échéances judiciaires, notamment l'examen de la demande de mise en liberté, et risquerait de porter "atteinte à l'indépendance des magistrats", a prévenu sur Franceinfo le plus haut procureur de France, Rémy Heitz, procureur général près la Cour de cassation.
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