"Il faudrait davantage de moyens pour atténuer leur souffrance": un afflux de réfugiés burkinabè au Mali inquiète le HCR

Par Lorène Bienvenu avec AFP


Le Haut-commissariat de l'ONU pour les réfugiés alerte sur une situation d'"urgence humanitaire" dans le centre du Mali, où afflux une nouvelle vague de réfugiés burkinabè. La région est en proie à une insurrection djihadiste dirigée par des groupes terroristes affiliés à Al-Qaïda et à Daech, depuis près d'une décennie.

Le Haut-commissariat de l'ONU pour les réfugiés alerte sur une situation d'"urgence humanitaire" dans le centre du Mali, où afflux une nouvelle vague de réfugiés burkinabè. La région est en proie à une insurrection djihadiste dirigée par des groupes terroristes affiliés à Al-Qaïda et à Daech, depuis près d'une décennie.
Le Mali est confronté à une situation d'"urgence humanitaire" où afflut une grande vague de réfugiés en provenance de son pays voisin, le Burkina Faso. Le Haut-commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) alerte sur les "répercussions graves" sur leurs conditions de vie.
Entre le 7 et le 15 août, le nombre de personnes enregistrées par la Commission nationale chargée des réfugiés (CNCR) est passé de 1 733 à 12 000 environ, soit plus de 1 500 par jour, indique le HCR dans un communiqué transmis mardi 2 septembre. L’instance internationale fait état d'un "afflux massif" de réfugiés burkinabè, depuis le 5 août dans la région de Bandiagara, dans le centre du Mali.
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Les personnes qui ont fui sont une majorité de femmes et d’enfants qui ont quitté leurs villages frontaliers avec le Mali. Ils auraient reçu un ultimatum de la part de groupes armés, les poussant à "quitter leurs foyers, sous peine de représailles", selon le HCR.
Sur la journée du 31 août seulement, 1 509 personnes en provenance de plusieurs villages du Burkina ont également été pré-enregistrées en moins de 24 heures. Le HCR ne cache pas ses difficultés. "Il faudrait d'avantage de ressources et de moyens pour prendre en compte la souffrance de ces gens", explique dans le communiqué de l'agence onusienne Patrice Memze, représentant par intérim du HCR au Mali.
Le Mali compte déjà 83 417 réfugiés, pour une population de 100 400 habitants. "Ce nouvel afflux, qui pourrait se poursuivre, met à rude épreuve les capacités de contingence de la localité", selon le HCR. L’ONG alerte aussi sur l’insuffisance des ressources disponibles pour venir en aide aux réfugiés, malgré la solidarité des autorités locales et des communautés hôtes.
Une région en proie au terrorisme djihadiste
Cette situation d’urgence s’est déclenchée et évolue dans un contexte de crise budgétaire sans précédent, selon l’HCR. Une période de trouble qui touche la quasi-totalité des organisations humanitaires et réduit ainsi ses capacités opérationnelles.
Le pays d’Afrique de l’ouest, comme ses voisins du Mali et du Niger, est victime d’attaques de groupes djihadistes liés à Al-Qaïda et l’État islamique. Les trois pays, dirigés par des militaires, ont créé l'Alliance des Etats du Sahel (AES) au sein de laquelle ils coopèrent notamment militairement.
Le Mali 🇲🇱 accueille un nombre croissant de #réfugiés burkinabè 🇧🇫, aggravant la crise humanitaire dans les régions centrales du pays. Flash info: pic.twitter.com/9pzNqYXY4i
— UNHCR Mali (@UNHCRMali) May 2, 2025
En 2024, plus de la moitié des décès dus au "terrorisme" dans le monde a été enregistrée au Sahel (3 885 sur un total de 7 555), rapporte l'Indice mondial du terrorisme élaboré par le groupe de réflexion australien Institute for Economics and Peace.
Au Burkina, la région frontalière avec le Mali est devenue l’épicentre de la crise sécuritaire. Depuis 2015, le pays est en proie à une insurrection djihadiste dirigée par des groupes terroristes affiliés à Al-Qaïda et à Daech. "Ces derniers ont étendu leur emprise à près de 40 % du territoire national", rapporte le site des Nations unies.
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Les pays de l’AES ont mis la priorité sur la lutte contre le djihadisme, dans cette région qui est minée par des violences terroristes. Mais les ONG peinent à venir en aide aux populations. Les islamistes les perçoivent comme de symboles de l'influence occidentale menaçant leur idéologie leur et contrôle territorial. Et les régimes militaires les soupçonnent d’espionnage et de complicité avec les djihadistes.
Rupture avec les ONG
Au Burkina, les militaires au pouvoir ont révoqué en l'espace d'un mois, entre juin et juillet, l'autorisation d’exercer de vingt-et-un ONG pour raison administrative, et suspendu dix autres associations pour une durée de trois mois.
Même constat au Mali, où le régime a suspendu en 2022 les ONG financées ou soutenues par la France, ancienne puissance coloniale à laquelle les pays de l’AES ont tourné le dos.
Le Mali projette également de prélever 10% des fonds des ONG et associations "destinés au développement économique, social, environnemental et culturel", selon un projet de loi consulté par l'AFP, début août.
Des femmes, des enfants, risquent de sombrer dans une détresse encore plus profonde.
Haut-commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR)
Aux pressions des régimes militaires de la région s’ajoutent les violences exercées par les Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM, affilié à Al-Qaïda) et l'État islamique au Sahel. En 2024, au moins 26 travailleurs humanitaires ont été tués au Sahel, 23 blessés et 67 kidnappés dans 116 incidents de sécurité, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA).
Ces organisations humanitaires et les associations internationales restent pourtant les derniers espoirs de près de 29 millions de personnes en besoin d'assistance humanitaire dans la région.
📍En visite à Koro (Région de Bandiagara)🇲🇱, le Représentant du HCR au Mali, M. @pierre_camara, a évalué la situation et les besoins face au nouvel afflux de réfugiés burkinabè et salué la solidarité des autorités et communautés locales🙏. #AvecLesRéfugiés
— UNHCR Mali (@UNHCRMali) August 25, 2025
Pour tout écouter 👇 pic.twitter.com/l7CP8JwWhh
Dans la région, ces nouveaux afflux de migrants "a des répercussions graves sur les conditions de vie des personnes déplacées de forces, en particulier les réfugiés installés dans le centre", souligne le HCR.
"Sans un appui urgent des partenaires techniques et financiers, des milliers de vies, majoritairement des femmes, des enfants, risquent de sombrer dans une détresse encore plus profonde", a prévenu l'organisation internationale.
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