Gérard Depardieu face à la justice: l'acteur sera jugé pour viols par la cour criminelle de Paris

Par Terriennes AFP
Par Isabelle Mourgere AFP


Jugé pour deux agressions sexuelles lors du tournage d'un film en 2021, Gérard Depardieu a été condamné à 18 mois de prison avec sursis lors d'un premier procès. Mais le parcours judiciaire ne s'arrête pas là pour l'acteur de 76 ans. Il sera jugé par la cour criminelle de Paris pour viols sur la comédienne Charlotte Arnould.

Jugé pour deux agressions sexuelles lors du tournage d'un film en 2021, Gérard Depardieu a été condamné à 18 mois de prison avec sursis lors d'un premier procès. Mais le parcours judiciaire ne s'arrête pas là pour l'acteur de 76 ans. Il sera jugé par la cour criminelle de Paris pour viols sur la comédienne Charlotte Arnould.
Gérard Depardieu renvoyé devant la cour criminelle de Paris pour viols sur la comédienne Charlotte Arnould. L'information a été rendue publique par Carine Durrieu-Diebolt, avocate de la plaignante sur franceinfo.
Cette ordonnance de mise en accusation est consécutive aux confirmations de réquisitions du parquet de Paris, pour les viols du 7 et du 13 août 2018 au domicile de Gérard Depardieu à Paris, avec contrainte morale et sur une victime "en état de sidération".
Cette mise en accusation s'appuie notamment sur la vidéosurveillance à l'intérieur du domicile de l'acteur et sur "les réactions immédiates de Charlotte Arnould qui, rapidement après les faits, s'était confiée à son entourage et s'était rendue chez un gynécologue", précise franceinfo.
Fin août 2018, la comédienne de 28 ans avait dénoncé deux viols au domicile parisien de la star, dans le 6e arrondissement de Paris. Elle avait obtenu à l'été 2020 que l'enquête, d'abord classée par le parquet de Paris en juin 2019, soit confiée à un juge d'instruction. Une confrontation avait eu lieu en juin 2023 entre l'acteur et la comédienne.
"Les faits de viols et d’agressions sexuelles ont été retenus pour les 7 et 13 août.
Désormais, nous attendons la suite... Merci à mon avocate Carine Durrieu-Diebolt", a commenté la comédienne sur son compte instagram.
18 mois avec sursis
En mai 2025, Gérard Depardieu a été condamné à dix-huit mois de prison avec sursis, assortis d'une peine complémentaire de privation de ses droits d’éligibilité de deux ans et d'une inscription au fichier national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles.
L'acteur de 76 ans a fait appel de la décision.
Celui qu'on présente comme une figure monstre du cinéma français et internationalement connue, était accusé d'agressions sexuelles sur deux femmes lors du tournage du film Les Volets verts. Son avocat, Jérémie Assous, a annoncé que l'acteur allait faire appel de la décision.
Retour sur un procès #Metoo
"J'adore les femmes et la féminité, je me sens moi-même très féminin" : voila ce que déclarait Gérard Depardieu à la barre lors de la première audience du procès, suscitant quelques rires dans la salle. Appelé à parler de sa personnalité par le président du tribunal correctionnel de Paris, l'acteur a admis pouvoir être "grossier, vulgaire, mais je ne passe pas mon temps à faire ça", a-t-il poursuivi, regrettant "les temps anciens" et prenant la défense de Roman Polanski, réalisateur "décrié", "qui a vécu 50 ans de persécution".
Moi, Fanny Ardant, je n'ai jamais assisté à un geste que j'aurais trouvé choquant. Fanny Ardant
Lors de la troisième journée de procès consacrée aux auditions de témoins, le directeur photo, le chef opérateur son ou encore le chef machiniste sur Les Volets verts ont nié avoir vu la moindre agression sur le tournage du film de Jacques Becker en 2021. "Je peux vous garantir que si j'avais assisté à une agression sexuelle, je serais aussi devant vous aujourd'hui pour le dire", lance Yves Angelo, directeur photo. Comme Fanny Ardant qui a témoigné la première, aucun de ces techniciens n'a déclaré avoir eu quelque chose à signaler concernant le comportement de l'acteur. "Moi, Fanny Ardant, je n'ai jamais assisté à un geste que j'aurais trouvé choquant" de Gérard Depardieu, a affirmé l'amie de l'acteur, 76 ans comme lui et qui a participé au tournage du film.

Des agressions "intentionnelles"
Les juges ont donc suivi la réquisition : soit dix-huit mois de prison avec sursis pour des agressions sexuelles que le parquet a présentées comme "intentionnelles" avant que la défense ne plaide la relaxe en fustigeant une "organisation" pour faire tomber l'acteur.
Ça fait trois ans qu'on me traîne dans la boue par des mensonges, des calomnies qui rongent mon sang et mon désir de communication avec les êtres de tous âges. Gérard Depardieu
"Ça fait trois ans qu'on me traîne dans la boue par des mensonges, des calomnies qui rongent mon sang et mon désir de communication avec les êtres de tous âges", a dénoncé Gérard Depardieu devant le tribunal avant de quitter la salle.
Dans son réquisitoire, le procureur avait rappelé que les victimes étaient "des femmes en situation d'infériorité sociale et en décalage par rapport à la célébrité de l'agresseur sur le tournage" en 2021. Ce dernier, âgé de 76 ans, "jouit d'une notoriété, d'une aura et d'un statut monumental dans le cinéma français", a fait valoir le magistrat, qui a demandé au tribunal correctionnel de Paris de condamner Gérard Depardieu à une peine de 18 mois de prison assortie d'un sursis probatoire de trois ans.
Le procureur a aussi demandé une obligation de soins psychologiques, une inéligibilité de deux ans et l'inscription au fichier des auteurs d'infractions sexuelles.
"Affabulatrices", "agitées du bocal"
L'avocat de l'acteur a lui plaidé la relaxe pour son client, victime de "harcèlement" : "Je veux que dans ce dossier le cauchemar, l'enfer dans lequel Gérard Depardieu a été jeté se termine".
Sa très longue plaidoirie a été marquée par des passages survoltés à l'encontre des plaignantes. "Votre trauma, combien même l'agression aurait bien eu lieu, il est relatif ! C'est pas Guy Georges !", crie-t-il faisant référence au tueur en série. Pour l'avocat, Amélie et Sarah (prénom modifié) sont des affabulatrices au service d'une "organisation" de "féministes enragées", "d'agitées du bocal" qui bénéficie de "la publicité de Mediapart avec la complicité du parquet".
Pour les parties civiles, les réquisitions ont "fait la démonstration de la culpabilité" du prévenu, selon Me Carine Durrieu Diebolt, avocate d'une des plaignantes. Amélie, 54 ans, était décoratrice sur Les Volets verts. A la barre elle a raconté avoir été "coincée entre les jambes de Gérard Depardieu" qui lui a "malaxé les fesses et les seins" en proférant des propos à caractère sexuel.
Des accusations niées plusieurs fois par l'acteur. "Je ne vois pas pourquoi je m'amuserais à peloter une femme, des fesses, des seins, je ne suis pas un frotteur dans le métro", se défend-il face au président du tribunal.
"D'un autre temps"
Sarah, 34 ans et 3e assistante réalisatrice sur le tournage, a elle indiqué que l'acteur lui avait posé une main sur une fesse et qu'il avait recommencé sur ses seins. "Je l'ai peut-être frôlée avec le dos dans le couloir, mais je ne l'ai pas touchée !", a affirmé à la barre Gérard Depardieu. "Je n'ai pas fait d'agression sexuelle, une agression c'est plus grave que ça je crois".
"Plus grave que quoi ?", l'a interpellé l'avocate de Sarah, Me Claude Vincent. "Plus grave qu'une main aux fesses. Enfin, je n'ai pas mis de main aux fesses !", s'est empressé d'ajouter l'acteur, qui a affirmé être "d'un autre temps". Un temps où les femmes "ne parlaient pas", "ne déposaient pas plainte" quand un homme les touchait, ont rappelé les parties civiles, dénonçant "l'apologie du sexisme".
Ce procès est la meilleure illustration que non, on ne peut pas séparer l'homme de l'artiste ! Il n'est ni Jean Valjean, ni Cyrano de Bergerac ! Il n'est pas les hommes qu'il a joués. Il est Gérard Depardieu et il est misogyne ! Me Claude Vincent, avocate de Sarah
"Menteuses, hystériques, allez pleurer !", a ainsi crié Me Assous pendant le procès à Amélie et Sarah.
Ce procès, a rappelé l'avocate de Sarah, "est la meilleure illustration que non, on ne peut pas séparer l'homme de l'artiste ! Il n'est ni Jean Valjean, ni Cyrano de Bergerac ! Il n'est pas les hommes qu'il a joués. Il est Gérard Depardieu et il est misogyne !" "On a cru en nous traitant d'hystériques qu'on allait nous humilier mais ce qu'ils ne comprennent pas c'est qu'on est fières d'être femmes", a terminé Me Vincent.

"Dire non"
Gérard Depardieu est par ailleurs mis en examen pour "viols" et "agressions sexuelles" depuis le 16 décembre 2020.
Pendant le procès, quatre femmes en plus des plaignantes sont venues témoigner d'agressions sexuelles entre 2007 et 2015. A chaque fois, elles ont évoqué "les mains sur les seins", "la main dans la culotte" et aussi le silence gardé, "parce qu'à 20 ans, c'est difficile d'aller au commissariat et de porter plainte contre M. Depardieu", a témoigné l'une d'entre elles.
Ben quoi ? Je croyais que tu voulais réussir dans le cinéma. Témoignage de Sarah B.
Parmi elles : Marie, une journaliste qui a tourné une émission de télévision en 2007 avec Gérard Depardieu comme invité. Des sanglots dans la voix, la jeune femme a raconté le jour où l'acteur est arrivé derrière elle et lui "a pétri le dos en grognant" et en descendant vers sa jupe.
Enfin, autre témoignage, celui de Sarah B., elle avait 20 ans quand elle a tourné sur la série Marseille avec Gérard Depardieu. "Il avait sa main dans mon dos, il a commencé à grogner, j'ai trouvé ça étrange", commence-t-elle. "Et il a mis sa main dans ma culotte contre ma peau. Je l'ai repoussé, il l'a refait". Selon sa déposition devant le tribunal, il aurait ensuite dit : "Ben quoi ? Je croyais que tu voulais réussir dans le cinéma".
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