RDC: l'ex-ministre de la Justice condamné à trois ans de travaux forcés

Par AFP © 2025 AFP

L'ex-ministre de la Justice de la République démocratique du Congo (RDC) Constant Mutamba, démissionnaire depuis juin, a été condamné mardi à trois ans de travaux forcés et cinq ans d'inéligibilité pour détournement de fonds publics, a constaté un journaliste de l'AFP.
Accusé d'avoir violé les règles d'attribution des marchés publics pour un projet de construction d'une prison, M. Mutamba avait annoncé sa démission le 18 juin, dénonçant un "complot politique" contre sa personne.
L'ex-ministre de 37 ans, dont le procès s'était ouvert en juillet, a comparu mardi devant la Cour de cassation à Kinshasa, escorté par des militaires et arborant un masque chirurgical sur le visage.
Il avait été placé en résidence surveillée lundi, à la veille de cette audience de prononcé du verdict. Il lui était interdit de quitter la capitale depuis juin.
Un important dispositif militaire et policier avait été déployé mardi aux environs de la cour pour empêcher d'éventuels débordements de ses partisans.
L'ex-ministre a été reconnu coupable d'avoir fait verser, sans autorisation préalable du gouvernement, à la société Zion Construction SARL, la somme de 19,9 millions de dollars sur des fonds publics, pour un projet de construction d'une prison à Kisangani (nord-est) d'un budget d'environ 40 millions de dollars.
M. Mutamba avait "l'intention d'enrichir frauduleusement la société Zion Construction" au "préjudice de l'Etat", a estimé le président de la Cour de cassation, Jacques Kabasele, lors de la lecture du jugement mardi.
En plus des trois ans de travaux forcés et des cinq ans d'inéligibilité, l'ex-ministre a également été condamné à restituer les 19 millions de dollars à l'Etat congolais.
- hâbleur et médiatique
La peine a été jugée "sévère" par l'avocat de M. Mutamba, Maître Paul Okito. M. Mutamba "n'a pas tiré profit de son acte criminel", il "n'a pas volé d'argent, tout l'argent se trouve dans les comptes", a assuré Me Okito face à la presse à la sortie de l'audience.
L'ex-ministre "a assumé ses responsabilités" et "n'a bénéficié d'aucune circonstance atténuante", a-t-il ajouté.
Le ministère public avait requis 10 ans de travaux forcés contre M. Mutamba.
Les cas de détournements de fonds publics sont fréquents en RDC, où l'indice de perception de la corruption est l'un des pires au monde, selon l'ONG Transparency International.
Lorsqu'il était ministre de la Justice, M. Mutamba avait déclaré vouloir rendre passible de la peine de mort ceux déclarés coupables d'avoir détourné l'argent de l'Etat.
Hâbleur et à l'aise face aux caméras, M. Mutamba n'hésitait pas à se faire filmer sermonnant des détenus en cours de libération ou assistant aux procès, retransmis en direct à la télévision nationale, de jeunes délinquants présumés.
Il était également apparu dans un clip diffusé par son ministère, semblant répondre directement, assis à son bureau, aux appels téléphoniques de concitoyens.
Ministre depuis mai 2024, Constant Mutamba s'est signalé à plusieurs reprises par des déclarations fracassantes à l'encontre des magistrats mais aussi du Rwanda, pays voisin soutien du groupe armé antigouvernemental M23 qui s'est emparé de vastes pans de territoires dans l'est de la RDC.
Affirmant dans sa lettre de démission n'avoir "jamais pris un seul dollar de l'Etat", il s'était dit victime d'un "complot politique visiblement conçu à Kigali (capitale du Rwanda, ndlr) et exécuté par certains de nos compatriotes".
La peine de travaux forcés n'est plus appliquée en RDC, et généralement commuée en peine de prison.
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