Le gouvernement espagnol veut régulariser 900 000 sans-papiers dans les trois prochaines années
A contre-courant des politiques migratoires mises en oeuvre dans de nombreux pays de l'UE pour limiter les flux migratoires, le gouvernement espagnol a décidé de régulariser la situation de quelque 900 000 sans-papiers. Cette régularisation massive vise notamment à lutter contre le vieillissement de la population et s’inscrit dans le cadre des efforts du pays pour accroître sa main-d’œuvre.
Cette réforme de la politique migratoire facilitera la délivrance de permis de séjour et de travail via une simplification des procédures de permis de travail et de séjour, en permettant aux migrants de s'inscrire comme travailleurs indépendants ou salariés et en leur accordant des droits du travail supplémentaires.
Pour Elma Saiz, la ministre socialiste de l'Inclusion, de la Sécurité sociale et des Migration, le nouveau règlement "ouvre des portes qui étaient auparavant fermées dans trois domaines : la formation, l'emploi et la famille. Trois domaines qui mènent à l'inclusion, mais avec des normes élevées en termes d'exigences juridiques et en termes de droits de l'Homme".
Selon les données fournies par le gouvernement espagnol, le pays aurait besoin d'environ 250 000 travailleurs étrangers enregistrés par an pour maintenir son État-providence. L'Espagne est par ailleurs l'un des pays européens qui accueille chaque année le plus de migrants irréguliers.
La dernière grande régularisation de sans-papiers en Espagne remonte à 2005, sous le mandat de José Luis Rodríguez Zapatero. A l'époque près de 600 000 personnes avaient pu profiter de ce dispositif qui avait été très contesté, en France, notamment, par des leaders de la droite gouvernementale et de l'extrême droite qui estimaient que cette politique libérale allait provoquer un "appel d'air" et constituait un risque de "pompe aspirante".
Près de quinze ans plus tard, une étude menée par trois économistes espagnols, réactualisée en 2023, avaient analysé les conséquences de cette politique. D'où il ressort qu'aucun accroissement des flux migratoires n’avait été constaté. Cette vaste étude avait aussi démontré que l’emploi formel des immigrants avait augmenté, sans pour autant affecter le marché de l'emploi. Par ailleurs les chercheurs avaient pu documenter l'impact positif de ces régularisations sur les recettes fiscales du pays (environ 4 000 euros par immigrant régularisé) "sans aucune preuve d’augmentation des dépenses publiques".
L'Espagne reste toutefois particulièrement exposée à la migration irrégulière en raison de sa situation géographique. Selon un nouveau rapport du ministère espagnol de l’Intérieur, entre janvier et août 2024, 31 155 migrants en situation irrégulière sont arrivés en Espagne, soit une hausse de 66,2 % par rapport à 2023.
Ces flux migratoires inquiètent une partie des électeurs espagnols. En quelques années, la question de l’immigration est d'ailleurs devenue l’un des sujets les plus controversés avec l'apparition du parti d’extrême droite Vox qui a engrangé plusieurs succès électoraux.
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