La première pandémie de l'histoire : l'origine d'une épidémie vieille de 1 500 ans révélée grâce à l'ADN

Des scientifiques ont fait une percée extraordinaire en remontant jusqu'à l'épicentre de la bactérie mortelle à l'origine de la première pandémie répertoriée au monde.
La peste de Justinien, qui a dévasté la Méditerranée orientale il y a 1 500 ans, est décrite depuis longtemps dans les textes historiques, mais jusqu'à présent, le microbe en question restait un mystère.
Des chercheurs ont identifié des traces de la bactérie Yersinia pestis dans une fosse commune située sous les ruines de Jerash, en Jordanie, fournissant ainsi la première preuve biologique directe de la peste de Justinien.
"Pendant des siècles, nous nous sommes appuyés sur des récits écrits décrivant une maladie dévastatrice, mais nous n'avions pas de preuves biologiques tangibles de la présence de la peste", explique Rays HY Jiang, auteur principal de l'étude et professeur associé au Collège de santé publique de l'USF.
"Nos résultats fournissent la pièce manquante de ce puzzle, offrant la première fenêtre génétique directe sur la façon dont cette pandémie s'est déroulée au cœur de l'empire', poursuit-il.
Comment Yersinia pestis a provoqué une pandémie
La peste de Justinien, qui a débuté en 541 de notre ère, est la première pandémie enregistrée dans le monde. Balayant la Méditerranée orientale et l'Empire byzantin, certains historiens estiment qu'il s'agit de l'une des pandémies les plus meurtrières de l'histoire, qui a entraîné la mort d'environ 15 à 100 millions de personnes au cours de ses deux siècles de récurrence.
Le mystère de la peste est désormais résolu : les chercheurs pensent qu'elle a été causée par Yersinia pestis, la même bactérie responsable d'épidémies ultérieures, dont la peste noire en 1346.
Cette bactérie zoonotique se propage principalement par l'intermédiaire des puces qui infestent les rongeurs, en particulier les rats vivant en contact étroit avec les humains, et peut également être transmise directement entre les personnes sous sa forme pneumonique.
Percer un mystère vieux de 1 500 ans
Grâce à des techniques avancées d'analyse de l'ADN, la nouvelle étude , menée par une équipe interdisciplinaire de l'université de Floride du Sud et de l'université de Floride Atlantique, a examiné huit dents humaines retrouvées dans des chambres funéraires situées sous l'ancien hippodrome romain de Jerash.
L'ADN a révélé que les victimes partageaient des souches presque identiques de Y pestis, ce qui confirme la présence de la bactérie dans l'empire entre 550 et 660.
Les résultats suggèrent une épidémie rapide et mortelle, en accord avec les récits historiques de décès massifs.
"Le site de Jerash offre un rare aperçu de la manière dont les sociétés anciennes réagissaient aux catastrophes sanitaires. Jerash était l'une des villes clés de l'Empire romain d'Orient, une plaque tournante commerciale documentée avec des structures magnifiques. Le fait qu'un lieu construit à l'origine pour le divertissement et la fierté civique soit devenu un cimetière de masse en période d'urgence montre que les centres urbains ont très probablement été débordé," expose encore Rays HY Jiang
Une étude connexe montre que Y pestis a circulé parmi les populations humaines pendant des millénaires avant l'épidémie de Justinien. Elle suggère également que les pandémies ultérieures - y compris la peste noire et les cas sporadiques actuels - n'ont pas émergé d'une source unique mais sont apparues indépendamment des réservoirs animaux.
"Nous sommes confrontés à la peste depuis quelques milliers d'années et des gens en meurent encore aujourd'hui. Comme le COVID, elle continue d'évoluer et les mesures de confinement ne peuvent manifestement pas l'éliminer. Nous devons être prudents, mais la menace ne disparaîtra jamais", prévient Rays HY Jiang.
Yesterday