"Mains rouges" sur le Mémorial de la Shoah: quatre Bulgares condamnés à de la prison ferme
Quatre ressortissants bulgares ont été condamnés ce vendredi à des peines de prison ferme allant de deux à quatre ans pour avoir dégradé le Mémorial de la Shoah à Paris ainsi que d'autres bâtiments avec des graffitis "main rouge" en mai 2024.
Un acte que les juges ont dit faisait partie d'une campagne coordonnée d'ingérence étrangère destinée à attiser les tensions en France.
Le tribunal correctionnel a prononcé une peine de deux ans contre Georgi Filipov et Kiril Milushev, présentés comme les exécutants, de quatre ans contre Nikolay Ivanov et de trois ans contre Mircho Angelov, toujours en fuite, ces deux derniers étant considérés comme les "cerveaux" de l’opération. Toutes les peines sont assorties à une interdiction définitive du territoire français.
Dans son jugement, le tribunal a déclaré que les hommes avaient sciemment pris pour cible un site juif et que l'acte de vandalisme avait été "commis dans le cadre d'une opération coordonnée dans un but hostile pour agiter l’opinion publique" et "d’appuyer sur un clivage déjà existant", a justifié la juge.
Tout en reconnaissant l'existence d'une ingérence étrangère, les juges ont souligné que cela ne diminuait pas la responsabilité individuelle des accusés pour le "préjudice considérable" causé.
Le tag de la "main rouge", peint une trentaine de fois sur le mur des Justes, est associé au lynchage de deux soldats israéliens à Ramallah pendant la seconde Intifada en 2000.
Le tribunal a estimé que le choix du lieu, le Mémorial de la Shoah, un site visible et clairement identifiable, était délibéré.
Les accusés ont nié toute motivation politique, affirmant avoir agi pour des raisons financières. Chacun d'entre eux dispose de dix jours pour faire appel de la décision.
Le graffiti de la "main rouge", peint sur les murs du Mémorial de la Shoah et sur plusieurs bâtiments de Paris en mai 2024, a immédiatement suscité des comparaisons avec une opération similaire menée quelques mois avant l'incident, lorsque des étoiles de David bleues avaient été peintes sur des bâtiments de la capitale française.
Les enquêteurs ont révélé que cette opération avait été commanditée par un homme d'affaires moldave pro-russe, Anatoli Prizenko.
Les enquêteurs pensent que l'incident survenu au Mémorial de la Shoah s'inscrit dans la même logique d'opération de déstabilisation.
Cependant, au tribunal cette semaine, les prévenus ont fourni peu d'informations sur les personnes qui les ont financés.
Georgi Filipov a déclaré qu'il avait peint les mains rouges en échange de 1 000 euros pour aider à payer la pension alimentaire de son fils de neuf ans.
Il a déclaré avoir été payé par un homme nommé Mircho Angelov, l'autre condamné qui est toujours en fuite, mais n'a pas apporté d'éclaircissements sur les accusations d'ingérence étrangère.
Kiril Milushev a admis avoir filmé les graffitis sur les instructions d'Angelov pour 500 euros.
Les enquêteurs affirment que Kiril Milushev était également soupçonné d'avoir dégradé une tombe à Munich et d'avoir planifié de coller des autocollants à Zurich avant une sommet pour la paix en Ukraine l'année dernière.
Le troisième accusé, Nikolay Ivanov, a nié toute attache pro-russe ou connaissance de la nature politique de l'opération.
Il a reconnu avoir acheté des billets d'avion et de bus de Sofia à Paris et avoir payé des chambres d'hôtel, mais a déclaré avoir agi à la demande d'Angelov.
Les avocats de la défense ont fait valoir que leurs clients n'étaient pas motivés par l'idéologie, mais par la pauvreté et la promesse de "l'argent facile".
L'avocat de Georgi Filipov, Me Martin Vettes, a reconnu que les tatouages néo-nazis du prévenu constituaient "une circonstance aggravante en soi", mais il a nié toute motivation antisémite, décrivant Filipov comme un homme en mauvaise santé incapable de travailler depuis des mois.
Cette affaire intervient dans un contexte de recrudescence des actes antisémites et islamophobes en France.
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