États-Unis: d'où vient le mouvement "Antifa" classé comme "organisation terroriste" par Donald Trump?

Par Benjamin Beraud avec agences


Donald Trump a signé ce lundi 22 septembre un décret classant officiellement comme une "organisation terroriste" le mouvement "Antifa", au lendemain d'une cérémonie d'hommage au militant ultraconservateur assassiné Charlie Kirk. Crée en Europe, il rassemble des groupes se réclamant de l'antifascisme.

Donald Trump a signé ce lundi 22 septembre un décret classant officiellement comme une "organisation terroriste" le mouvement "Antifa", au lendemain d'une cérémonie d'hommage au militant ultraconservateur assassiné Charlie Kirk. Crée en Europe, il rassemble des groupes se réclamant de l'antifascisme.
Le mouvement Antifa, pour "antifasciste", s'apparente davantage à une mouvance qu'à un groupe organisé. Par définition, ils s'oppose au fascisme et, plus largement, à l'ensemble de l'extrême droite. Ses membres sont connus pour leur recours à l'action directe et sont souvent pointés du doigt par la droite à propos des violences dans différentes manifestations.
Après l'assassinat de Charlie Kirk le 10 septembre, et sans en connaître immédiatement le mobile, la droite trumpiste avait rapidement désigné la gauche américaine comme responsable du climat de violence politique qui règne dans le pays et parlé de "terrorisme intérieur" de gauche. Le suspect principal de son assassinat, Tyler Robinson, est présenté par une large partie de la droite comme un tueur d'"extrême gauche".
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"Le problème de la violence vient de la gauche", selon Donald Trump
Le président américain a signé un décret présidentiel à ce sujet ce lundi 22 septembre. Il écrit: "l'Antifa est une entreprise militarisée et anarchiste qui appelle explicitement au renversement du gouvernement des États-Unis, des autorités de police et de notre système juridique."
Dans un communiqué, la Maison Blanche a qualifié les antifa d'"anarchiste". "Le problème de la violence vient de la gauche", précise le communiqué. C'est pour cela que Donald Trump vient de classer Antifa, un réseau de terroristes de gauche radicale qui vise à renverser le gouvernement par la violence (...), comme une organisation terroriste nationale."
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Le président américain avait déjà annoncé la semaine dernière son intention de classer comme tel ce mouvement, même si les États-Unis n'ont à ce jour aucune liste d'"organisations terroristes nationales".
"Seul le secrétaire d'État américain peut désigner une organisation terroriste – et il s'agit d'une désignation étrangère et non nationale", rappelait en 2020 Bruce Hoffman, membre du groupe de réflexion Council on Foreign Relations et spécialiste du terrorisme sur X, lorsque le sujet était sur la table après les manifestations en soutien à George Floyd, tué lors d'une intervention policière.
Un mouvement né en Europe et dépourvu de dirigeants
Cent ans après sa création dans l'Italie des années 1920, contre le Parti national fasciste de Benito Mussolini, le cri de ralliement des antifascistes refait surface dans la plupart des manifestations lancées par la gauche.
Les antifa désignent plutôt des "groupes informels" fonctionnant de façon indépendante, selon l'historien américain Mark Bray, auteur d'un livre de référence sur le sujet. Ses membres, souvent entièrement vêtus de noir, dénoncent le racisme, les idées d'extrême droite et ce qu'ils considèrent comme du fascisme, et estiment que des actions violentes sont parfois justifiées.

Il s'est manifesté aux États-Unis sous le premier mandat de Donald Trump, notamment après une manifestation d'extrême droite à Charlottesville (Virginie, est), en août 2017. Une voiture avait percuté un groupe de militants antiracistes venus tenir tête aux groupuscules d'extrême droite. Une personne avait été tuée et une vingtaine d'autres blessée.
En 2020, secoué par des manifestants après la mort de George Floyd, Donald Trump avait déjà évoqué la possibilité de désigner le mouvement comme organisation "terroriste".
Elle ne constitue pas un groupe ou une organisation, mais une idéologie. Chris Wray, le précédent directeur du FBI, la police fédérale américaine
Tout en reconnaissant que la mouvance représentait un sujet de préoccupation pour l'ordre public, le précédent directeur du FBI, la police fédérale américaine, Chris Wray, estimait en 2020 qu'elle ne constituait "pas un groupe ou une organisation, mais une idéologie".
Cinq ans après Donald Trump signe officiellement le décret à ce sujet. Une initiative symbolique mais politiquement significative. "Ça montre encore une fois les inclinations autoritaires de Trump et de son administration", rappelait Mario Del Pero, professeur d’histoire internationale à Sciences-Po Paris à la RTBF et auteur d'un article "Existe-t-il une "menace antifa" aux États-Unis, comme l'affirme Donald Trump?"
"C'est une façon de démoniser l’opposition radicale. Bien entendu, dans cette opposition radicale, il y a des groupes qui ne condamnent pas la violence, qui sont prêts à l’utiliser, mais pas que."
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